Quotient conjugal: comment l’impôt sur le revenu augmente les inégalités entre hommes et femmes?

Payer moins d’impôt lorsqu’on se marie ou qu’on se pacse n’est pas une réalité pour tous. En effet, de nombreuses études montrent que lorsque que des écarts de rémunération au sein d’un couple sont importants, le conjoint gagnant moins de revenus est défavorisé. La plupart du temps cela concerne des femmes. Décryptage.

Sommaire

  • Le quotient conjugal, c’est quoi ?
  • Un impôt qui creuse les inégalités au sein du couple
  • Une conjugalisation déséquilibrée
  • Un impôt fondé sur le modèle « monsieur gagne-pain, madame au foyer »
  • 2,5 millions de ménages concernés

Le quotient conjugal, c’est quoi ?

En France, les couples mariés/pacsés sont soumis au « quotient conjugal ». Cela signifie que les revenus du couple sont globalisés pour être imposés ensemble. L’administration fiscale additionne les revenus, divise par le nombre de part fiscale et applique un taux d’imposition en fonction de la tranche à laquelle il appartient. Le même niveau d’imposition s’applique donc aux revenus individuels de chacun. Il en résulte la plupart du temps des économies d’impôts.

Un impôt qui creuse les inégalités au sein du couple

Néanmoins, le quotient conjugal a pour conséquence d’augmenter le taux d’imposition de celui qui a les revenus les plus faibles, majoritairement des femmes.

Reprenons l’exemple de Terre d’épargne. Un couple non pacsé ou non marié dont les revenus sont très inégaux (100.000 euros annuels pour l’un et à 10.000 euros annuels pour l’autre) déclare ses revenus séparément et paye un impôt individuel. Celui qui gagne 10.000 euros par an n’est pas imposable. Celui qui gagne 100.000 euros doit acquitter 22.819 euros. Si ce même couple ce pacse ou se marie, alors l’administration fiscale applique un taux d’imposition conjugalisé. Ainsi, le couple doit verser 17.712 euros d’impôt, soit une économie de 5 107 euros. Cependant, celui qui gagne très peu voit son taux d’imposition grimper fortement, il passe de 0 à 16,1% dans cet exemple.

Une conjugalisation déséquilibrée

Le membre du couple qui génère des revenus plus importants « est imposé à un taux moins élevé que s’il avait été imposé sur ses seuls revenus individuels », souligne l’Insee. Plus les inégalités sont forts, plus il a de chances de passer à la tranche d’imposition inférieure. Au contraire, pour « le second apporteur de ressources, qui a les revenus les plus faibles, le taux d’imposition est plus élevé en raison de la conjugalisation » continue l’institut dans son étude.
« La conjugalisation augmente en moyenne de 6 points le taux marginal d’imposition des conjoints qui ont les ressources les moins élevées, dont les trois quarts sont des femmes, tout en diminuant de 13 points en moyenne celui des conjoints aux ressources les plus élevées », a ainsi chiffré l’Insee.

Un impôt fondé sur le modèle « monsieur gagne-pain, madame au foyer »

Le quotient conjugal a été introduit en 1945 en cohérence avec le modèle « monsieur gagne-pain, madame au foyer ». Il contribuait avec d’autres politiques à encourager la répartition des rôles au sein du couple. Dans la France des année 1950, les tâches domestiques et familiales sont réalisées par des femmes et le travail marchand est réalisé par les hommes. L’homme représentant le chef de famille mettait l’intégralité de ses ressources en commun. Ce qui n’est généralement plus le cas aujourd’hui. Dans le livre « Pour une révolution fiscale », l’économiste Thomas Piketty, « L’administration fiscale doit cesser de se soucier de qui vit en couple avec qui » et plaide pour une individualisation de l’impôt.

« L’administration fiscale doit cesser de se soucier de qui vit en couple avec qui. » Thomas Piketty

2,5 millions de ménages concernés

D’après les chiffres de l’INSEE, sur 9,6 millions de ménages affectés par ce quotient conjugal, sept millions de ménages sont gagnants, contre deux millions et demi de perdants en 2019. Une alternative existe, depuis la mise en place de l’impôt à la source sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, il est possible pour les couples mariés/pacsés de souscrire à l’impôt individuel. Or celui-ci est rarement exercé car il est relativement méconnu. Par ailleurs, il suppose une négociation pour faire accepter à son conjoint le passage à des taux individualisés. « D’autres pays ont fait le choix […] de tenir compte des revenus des conjoints d’une autre manière via un crédit d’impôt ou un abattement » souligne l’INSEE.

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