Consentement explicite obligatoire : l’Espagne durcit sa législation contre le viol

L’obligation d’un consentement explicite lors de relations sexuelles a été introduite dans la législation espagnole et a été approuvée jeudi 25 août par les députés espagnols. Un viol collectif de 2016 a provoqué cette décision historique.

Sommaire

    • Le consentement explicite, un acte central pour définir le viol
    • Une attitude passive signifie-t-elle un consentement ?
    • Quid de la notion en France ?
    • Le consentement explicite en Europe : 13 Etats sur 34
consentement explicite

Informelles – © Álvaro Barrientos

Le consentement explicite, un acte central pour définir le viol

Jeudi 25 août, les députés espagnols ont pris une décision historique. Par 205 voix contre 141 (et trois abstentions), les membres de la Chambre basse espagnole ont approuvé le durcissement de la « loi de garantie intégrale de la liberté sexuelle ». Désormais, tout acte sexuel réalisé sans consentement explicite sera considéré en Espagne comme un viol.

La loi exige ainsi qu’une relation sexuelle ne peut avoir lieu sans la verbalisation d’un « oui » explicite.
« Notre pays inscrit, enfin, dans sa loi que le consentement doit être l’élément central de nos relations sexuelles. Les femmes n’auront plus à démontrer qu’il y a eu violence ou intimidation lors d’une agression pour que cela soit reconnu comme une agression sexuelle », s’est réjouie la ministre de l’Egalité, Irene Montero (parti de gauche radicale Podemos).

Surnommée « solo si es si » (« seul un oui est un oui » en espagnol), la loi est désormais plus précise. Il était jusqu’ici nécessaire de prouver un acte de violence ou d’intimidation pour qualifier un viol en Espagne. Aujourd’hui la défense change de rôle. C’est à l’agresseur de prouver qu’il y a eu consentement.

« Notre pays inscrit, enfin, dans sa loi que le consentement doit être l’élément central de nos relations sexuelles. Les femmes n’auront plus à démontrer qu’il y a eu violence ou intimidation lors d’une agression pour que cela soit reconnu comme une agression sexuelle. » Irene Montero, ministre de l’Egalité en Espagne

Une attitude passive signifie-t-elle un consentement ?

Cette question est au cœur de l’affaire dite de « la meute », un viol collectif d’une jeune femme de 18 ans par cinq hommes lors des fêtes de la San Fermin à Pampelune en 2016. Ces derniers avaient filmé leurs actes et s’en étaient vantés sur un groupe WhatsApp intitulé « la manada » (« la meute »). La victime avait donné, à huis clos, sa version des faits en 2017 lors du procès : « quand je me suis vue cernée… Je ne savais plus comment réagir… J’ai réagi en me soumettant », avait-elle expliqué.

En 2018, les juges avaient donc condamné en première instance chacun des cinq prévenus à neuf ans de prison pour « abus sexuel » sur cette jeune femme originaire de Madrid, aggravé du chef d’« abus de faiblesse ». Ils n’avaient pas retenu l’accusation de viol, le consentement explicite n’étant pas reconnu alors par le Code pénal. Les cinq hommes avaient été remis en liberté provisoire en juin 2018. Finalement, la justice avait considéré que la victime ne pouvait pas faire autre chose que « d’adopter une attitude de soumission et non de consentement ». La cour avait conclu au viol à l’unanimité et les membres de « la meute » furent condamnés à 15 ans de prison.

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Quid de la notion en France ?

En France, aujourd’hui encore, la victime est supposée consentante, sauf si l’on prouve qu’il y a violence, contrainte, menace ou surprise. Dans le code pénal français, il est défini que « Tout acte de pénétration sexuelle […] commis […] par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol ». L’absence de consentement n’est alors pas prise en compte.

Catherine Le Magueresse, juriste et ancienne présidente de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail le déplore. « Quand bien même nous aurions la preuve que la femme a dit non, ça ne suffit pas à caractériser le viol. C’est inouï. Le non des femmes en soi n’a pas de valeur, n’est pas efficace pour constituer la culpabilité de l’agresseur » explique-t-elle au journal l’Humanité.

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Irene Montero, ministre de l’Egalité espagnole / Photo by JuanJo Martín/Efe/ABACAPRESS.COM

Le consentement explicite en Europe : 13 Etats sur 34

Pourtant l’absence de consentement est reconnue par le conseil d’Europe dans l’article 36 de la Convention d’Istanbul (Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à égard des femmes et la violence domestique). Cette norme exige à ses signataires d’ajouter à la définition juridique du viol la notion de consentement.

A ce jour, 34 États membres ont ratifié ce traité mais nombre d’entre eux n’ont pas encore mis leur législation en conformité avec l’article 36. Seuls l’Allemagne, la Belgique, la Croatie, Chypre, le Danemark, la Grèce, l’Irlande, l’Islande, le Luxembourg, Malte, le Royaume-Uni, la Suède et maintenant l’Espagne ont inscrit dans leur législation la notion de consentement.

 

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