Sommaire
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L’histoire familiale à la source du combat de Fatiha Briki
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Ses engagements militants
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Une détention à mettre en lien avec un durcissement du régime
Depuis mardi 21 juin, la garde à vue de Fatiha Briki a été prolongée sans que la police et la justice ne délivre les faits qui lui sont reprochés, au grand désespoir de sa famille ainsi que du CNLD, le Comité national pour la libération des détenus dont elle est membre. « Sous réserve du secret de l’instruction toujours en cours, sa garde à vue (a été) prolongée pour la 3e fois de 48h jusqu’à jeudi », explique Saïd Salhi, le vice-président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH)à l’AFP. « Il n’y a que dans les affaires du terrorisme qu’on peut prolonger la garde à vue jusqu’à 11 jours », souligne-t-il. C’est dire l’inquiétude de ses proches.
Toute sa vie, cette algérienne s’est battue dans son pays en faveur du respect des droits de l’Homme. Son combat a toujours agacé le gouvernement algérien, dont l’actuel président Abdelmadjid Tebboune et sa police qui ont militants politiques et journalistes dans le collimateur depuis des années. Celle qui a fait de la libération des prisonniers d’opinion l’un de ses principaux combats se retrouve aujourd’hui derrière les barreaux, comme environ 1200 autres détenus d’opinion.
L’histoire familiale à la source du combat de Fatiha Briki
Fatiha Briki est issue d’une famille attachée à l’indépendance de l’Algérie. Son père Yahia Briki est un moudjahid c’est-à-dire un membre du Front de Libération National ou de l’Armée de Libération Nationale pendant la guerre d’Algérie (1954-1962). Il a participé à la tentative d’assassinat du général Massu en 1958, connu pour son usage de la torture. Il est ensuite condamné à mort puis finalement libéré en 1962. On peut alors aisément mesurer la profondeur de l’engagement militant de Fatiha Briki dès son plus jeune âge du fait de son environnement familial très politisé.
Ses engagements militants
Ancienne enseignante à l’université, cette membre active du Comité contre la torture et du CNLD défend les détenus suite aux évènements d’octobre 1988. Ces journées désignent une série de manifestations dans plusieurs villes d’Algérie pour réclamer la libéralisation du régime, poussant le gouvernement à proclamer l’État de siège et à déployer 10 000 soldats. Cela donne lieu à des centaines de morts et des milliers d’arrestations. Fatiha Briki lutte également pour la cause amazighe, réclamant la reconnaissance de l’identité ce peuple berbère et l’officialisation de la sa langue, depuis le Printemps Berbère en 1980 en Algérie. Depuis l’indépendance, en effet, l’arabe est devenue la langue officielle du pays, se traduisant par une arabisation de l’enseignement, au détriment de la langue berbère, désormais écartée de la politique linguistique algérienne.
« Il n’y a que dans les affaires du terrorisme qu’on peut prolonger la garde à vue jusqu’à 11 jours », Saïd Salhi
Une détention à mettre en lien avec le contexte de durcissement du régime
La militante des droits de l’Homme est en prison depuis le 17 juin 2021. Son arrestation s’inscrit dans le contexte difficile et tendu des élections législatives du 12 juin 2021, symptomatique d’un durcissement de la répression depuis notamment le hirak, c’est-à-dire les manifestations s’opposant à la candidature de l’ex-président Abdelaziz Bouteflika. Ils dénoncent les manquements aux droits de l’homme et la spoliation du pouvoir populaire par la junte militaire. Fatiha Briki elle-même s’est indignée de la répression de ce mouvement, en prônant une transition démocratique dans le pays et en signant le 1er mai un appel avec d’autres personnalités algériennes pour stopper la “guerre déclarée contre le peuple algérien”.