Finance à impact : la success story Alter Equity de Fanny Picard

Rencontrée au Sommet pour la mesure d'impact, Fanny Picard, 54 ans, est une pionnière de la finance responsable ou à impact. C’est en 2007 qu’elle lance Alter Equity, le premier fonds centré sur les entreprises non cotées ayant un impact social ou environnemental positif. Où en est-elle aujourd'hui ? Quels sont ses investissements? Avec quels résultats? Entretien.

Sommaire

    • Une pionnière de la finance à impact
    • Les entreprises accompagnées par Alter Equity : CO2 évité, part de femmes…
    • Une méthodologie pour évaluer l’impact des entreprises sur la nature
    • Finance à impact ou finance durable ?

Une pionnière de la finance à impact

Fanny Picard, 54 ans, est une pionnière de la finance responsable. C’est en 2007 qu’elle a créé la société de gestion Alter Equity, qui se concentre sur les entreprises non cotées ayant un impact social ou environnemental positif. Parmi ses participations : OpenAirlines (logiciel d’éco-pilotage des avions), Ilek (fournisseur d’énergie renouvelable) ou encore Eficia (efficacité énergétique des bâtiments). La dirigeante était invitée au Sommet de la mesure d’impact qui s’est déroulé à l’Assemblée nationale à Paris le 13 février 2023. Informelles a voulu l’interroger.

Informelles : En tant que pionnière, quels obstacles avez-vous dû surmonter pour créer et faire prospérer votre fonds d’impact investing, Alter Equity ?

Fanny Picard : A l’époque, mes interlocuteurs étaient convaincus que la seule finalité de l’entreprise était de maximiser son profit au service de ses actionnaires. L’idée d’une responsabilité vis-à-vis des autres parties prenantes leur semblait complètement hors de propos. Ils pensaient que si une entreprise cherchait à être plus responsable, elle serait moins rentable. Cela a constitué la plus grosse difficulté. La crise financière qui a suivi la faillite de Lehman Brothers en 2008 a par ailleurs freiné l’intérêt des investisseurs pour le non coté (NDLR la clôture finale du premier fonds d’Alter Equity est intervenue en 2015).

Vous ne seriez pas arrivée là si…

F.P. : Peut-être si je n’avais pas rencontré Alain Grandjean (NDLR économiste expert de la transition énergétique, cofondateur en 2007 du cabinet de conseil Carbone 4 avec Jean-Marc Jancovici). En 2007, il m’a permis de comprendre la gravité des dérèglements environnementaux.

Avez-vous été inspirée par un rôle modèle féminin ?

F.P. : Non mais j’ai été aidée par plusieurs femmes, que je remercie.

« A l’époque, mes interlocuteurs étaient convaincus que la seule finalité de l’entreprise était de maximiser son profit au service de ses actionnaires. » Fanny Picard, fondatrice d’Alter Equity

Les entreprises accompagnées par Alter Equity : CO2 évité, part de femmes…

En quelques mots, quel est le bilan d’ Alter Equity à ce jour ?

F.P. : Aujourd’hui nous gérons deux fonds, qui ont rassemblé 150 millions d’euros en tout (NDLR Alter Equity commence à lever son troisième fonds en visant 150 millions d’euros). Nous avons investi dans vingt-six entreprises qui ont généré un impact considérable – en particulier, à fin 2022, elles avaient permis d’éviter l’émission de 4,6 millions de tonnes de CO2 soit plus de 1% des émissions annuelles de la France, un record au regard des montants investis (418 Mt CO2e au global en 2021 selon une estimation de l’émission des gaz à effet de serre émise par le CITEPA).

Quelle est la part de femmes à la tête des entreprises accompagnées ?

F.P. : Avec notre premier fonds, nous avons investi dans quatre entreprises (sur douze) dirigées par des femmes. Et si on tient compte de la présence d’une femme dans la direction, cela représente 42% de notre premier fonds. (NDLR l’équipe d’Alter Equity est composée à 75% de femmes).

Une méthodologie pour évaluer l’impact des entreprises sur la nature

Alter Equity et Carbone 4 ont annoncé en février avoir développé « la première méthodologie rigoureuse d’évaluation transversale des impacts des entreprises sur la nature ». De quoi s’agit-il ?

F.P. : C’est la première méthode d’évaluation de l’impact d’une entreprise sur l’environnement qui traite non seulement de l’impact sur le climat, mais aussi sur la biodiversité et sur les ressources non-vivantes. Cette méthodologie est aussi unique par sa solidité du point de vue scientifique.

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Finance à impact ou finance durable ?

Vous exprimez votre fierté d’avoir été la première en France et en Europe à parler de « finance à impact », et d’avoir contribué à l’émergence de cette finance-là… Le terme est devenu populaire, mais peut-on définir « l’impact »  ?

F.P. : C’est difficile car il y a presque autant de définitions de l’impact que d’acteurs de l’impact. Ma définition est restrictive ; elle comprend trois conditions : il faut que l’activité soit utile à la société (impact positif sur les personnes ou sur la nature), que l’entreprise ait un comportement responsable vis-à-vis de ses parties prenantes (salariés, clients, fournisseurs, territoires d’implantation…) et qu’elle évite les externalités négatives (NDLR comme la pollution et autres effets négatifs environnementaux ou sociaux dont le coût n’est pas supporté par l’entreprise).

Est-il selon vous problématique qu’il n’existe pas une définition unique de l’impact ?

F.P. : Pour des épargnants non-spécialistes, il serait certainement utile qu’une définition référente émerge… La Commission européenne parle d’investissement « durable », notamment dans le cadre du règlement SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) : c’est peut-être la définition qui deviendra la référence, sans le terme d’« impact ».

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