Sommaire
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Marguerite Durand, son itinéraire des planches à la presse
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Les convictions féministes de Marguerite naissent au congrès féministe international
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« La Fronde », support de revendications féministes
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De nouvelles pratiques émergent avec « La Fronde »
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Marguerite Durand, mémoire des femmes
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- Jules Cayron, Portrait de Marguerite Durand (1897), Paris, bibliothèque Marguerite-Durand. – Informelles
Marguerite Durand, son itinéraire des planches à la presse
Née en 1864, Marguerite Durand grandit dans un milieu bourgeois et catholique. D’abord élevée au Couvent des Dames Trinitaires à Paris, elle entre au Conservatoire à l’âge de 15 ans puis entame une carrière à la Comédie Française. Appréciée pour son talent et sa beauté, la notoriété de Marguerite grimpe à pas de loup. Elle interprète avec succès des rôles d’ingénue dans les pièces « Le Mariage de Figaro » de Beaumarchais, ou dans « Britannicus » et « Phèdre » de Jean Racine.
A 24 ans elle épouse George Laguerre, avocat républicain et député de la gauche radicale. Avec lui, Marguerite s’initie à l’écriture et se découvre une véritable passion pour le journalisme. Elle débute sa carrière à « La Presse » dirigée par son mari et entre au journal « Le Figaro » en 1891.
Les convictions féministes de Marguerite naissent au congrès féministe international
En avril 1896, « Le Figaro » lui demande de couvrir le Congrès féministe international qui se tient à l’hôtel des Sociétés savantes à Paris. « Le Figaro en 1896 m’avait chargée d’écrire un article sur le congrès féministe que des obstructions malveillantes, des quolibets et des chahuts d’étudiants ». Mais sur place, « frappée par la logique du discours » et par « le bien-fondé des revendications », Marguerite refuse d’écrire l’article commandé par le journal.
La vie de Marguerite prend alors une tournure différente. Celle qui est considérée aujourd’hui comme l’une des pionnières du féminisme en France ne l’avait pas toujours été. « Aux hommes le forum, aux femmes le foyer… Ainsi pensait la majorité. J’étais alors de la majorité », expliquera-t-elle plus tard à son amie, la journaliste Thilda Harlor. Marguerite se délie alors des mœurs sociétales qui astreignent les femmes aux seules tâches ménagères et mène une lutte sans merci pour l’égalité des sexes. Cette bataille, elle la commence en fondant son propre journal « La Fronde » exclusivement conçu et dirigé par des femmes.
« Aux hommes le forum, aux femmes le foyer… Ainsi pensait la majorité. J’étais alors de la majorité. » Marguerite Durand, journaliste et fondatrice du journal « La Fronde »
« La Fronde », support de revendications féministes
Les ambitions du journal sont claires, les frondeuses ne se veulent pas anti-hommes. Dès la sortie du premier numéro le 9 décembre 1897 elles expliquent que « ce n’est pas à l’antagonisme masculin » qu’elles déclarent la guerre mais « aux tyrans qui s’appellent : abus, préjugés, codes caducs, lois arbitraires ». Le journal « ne cherche pour la femme aucun triomphe sur l’homme », mais « réclame l’égalité des droits, le développement […] des facultés de la femme, ainsi qu’une place de créature libre dans la société ».
Et pour Marguerite Durand, pour arriver au changement il faut leur donner du pouvoir. Avec ce journal, Marguerite Durand entend ouvrir la voie du journalisme aux femmes, un métier jusqu’alors dominé par les hommes. Ainsi, il sera rédigé, fabriqué et distribué exclusivement par des femmes (journalistes, rédactrices, typographes, imprimeuses).
De nouvelles pratiques émergent avec « La Fronde »
Le journal innove en popularisant de nouvelles pratiques comme le journalisme d’identification où le journaliste prend la place de la victime pour mieux témoigner. Séverine, journaliste chez « La Fronde », se déguise par exemple en ouvrière du sucre lors d’une grande grève. Dans l’article qu’elle en tire, elle justifie ce journalisme de l’immersion : « ’idéal serait de passer ignoré, anonyme, si semblable à tous que nul ne vous soupçonnât ; […] C’est cela que j’ai fait. Presque une journée, mêlée à ces pauvres filles, vêtue comme elles. J’ai entendu leurs doléances librement formulées ; j’ai pénétré dans les usines, vu fonctionner le travail de celles qui s’étaient soumises ».
Marguerite Durand envoie ses journalistes partout sur le terrain pour couvrir des évènements, manifestions ou procès. Des frondeuses ont couvert le procès Dreyfus à Rennes ou celui de Zola en 1899. Leur ascension ont aussi permis l’accès à des lieux initialement interdits aux femmes tels que l’Assemblée nationale ou la Bourse de Paris.
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Marguerite Durand, mémoire des femmes
En 1931, Marguerite Durand fait don à la ville de Paris de toutes les archives conservées depuis les débuts de « La Fronde ». Elle dirige alors bénévolement la première bibliothèque de documentation féministe jusqu’à sa mort en 1936. On y trouve des milliers de documents français et étrangers (fonds iconographiques, manuscrits, titres de presse féminins et féministes issus essentiellement des 19ème et 20ème siècles etc). Aujourd’hui la Bibliothèque Marguerite Durand se situe au 79 rue Nationale dans le 13ème arrondissement.