Sommaire
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Première Amérindienne dans l’espace
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Mary Golda Ross, membre de la nation Cherokee
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Go West!
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Dans le programme secret Skunk Works
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Marraine de l’aérospatiale
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Combat pour les Amérindiens
Première Amérindienne dans l’espace
Le mois prochain, Nicole Aunapu Mann, originaire de la tribu indienne des Wailacki de Round Valley (Californie), sera la première femme amérindienne à voler dans l’espace. Commandante d’une mission vers la station spatiale internationale, elle pourrait également se rendre sur la Lune un jour. Elle fait en effet partie d’un groupe d’astronautes admissibles au programme Artémis de la NASA en 2029.
Mais le parcours de Nicole Aunapu Mann n’aurait pas été possible sans l’action sur terre de Mary Golda Ross. Cette ingénieure, mathématicienne, fut la première Amérindienne à collaborer aux projets militaires de Lockheed qui ouvrirent la voie au premier vol spatial. Elle participa à la conception du vaisseau spatial Agena pour les programmes Gemini et Apollo et à la rédaction à la fin des années 60 du guide de la NASA sur les voyages spatiaux et des vols prospectifs vers Mars et Vénus.
Station spatiale internationale en 2022 / Photo by Roscosmos Press Office/TASS/ABACAPRESS.COM
Mary Golda Ross, membre de la nation Cherokee
Mary Golda Ross naît en 1908 à Park Hill (Oklahoma), ville proche de la capitale de la nation Cherokee, Tahlequah, au Sud des montagnes Ozark. Ses deux parents sont citoyens Cherokee, et son arrière-arrière-grand-père, John Ross était le chef principal de la nation Cherokee. Il a lutté en vain à la fin des années 1830 pour l’indépendance de son peuple. Ses origines la marquent profondément.
A 16 ans, elle sort du lycée et obtient un diplôme en mathématiques de l’université Northeastern State Teachers en 1928, la seule femme de sa promotion. « Les mathématiques étaient plus amusantes que tout le reste. C’était toujours un jeu pour moi », raconte-t-elle. Enseignante, statisticienne au Bureau des affaires indiennes puis conseillère d’éducation pour des étudiants amérindiens à Santa Fe (Nouveau-Mexique), elle suit les cours d’été en astronomie à l’université Colorado State Teachers. Elle y obtient sa maîtrise en 1938.
Go West!
Avec la Seconde guerre mondiale, de nouvelles opportunités s’ouvrent pour elle. Les hommes partent au front et les femmes doivent les remplacer. Des professions interdites jusque-là s’ouvrent à elles. En 1945, près de 25% des femmes mariées travaillent. Encouragée par son père, qui pense que ses connaissances mathématiques peuvent servir l’armée américaine, Mary Ross part en Californie.
Elle devient ingénieure chez Lockheed Aircraft Corporation, groupe de l’industrie aéronautique fortement impliqué dans l’effort de guerre. 480 000 femmes travaillent alors dans cette industrie aux États-Unis. Certaines usines ont 60% de leurs effectifs composés de femmes.
Dans le programme secret Skunk Works
Chez Lockheed, Ross travaille sur le P-38 Lightning, l’un des avions de chasse les plus rapides du monde. Mais une idée folle la passionne, celle des voyages dans l’espace. Mais « si j’en avais parlé en 1942, ma crédibilité aurait été mise en doute », se souvient-t-elle des années plus tard.
A la fin de la guerre, les femmes doivent rentrer à la maison mais pas Mary Golda Ross. Lockheed l’envoie à Los Angeles, à l’université UCLA, pour se former à l’ingénierie aéronautique. Diplômée, elle rejoint les 40 ingénieurs fondateurs de Skunk Works, le programme ultra-secret de Lockheed. Elle est la seule femme d’une équipe qui développe des armements sophistiqués.
Recherches au Skunk Works pour la NASA en 2017 / Photo by NASA/ZUMA Wire/ABACAPRESS.COM
Marraine de l’aérospatiale
Dans le contexte de la guerre froide, son travail est marqué par le secret-défense. “L’étendue réelle (de son influence) est inconnue, car une grande partie de son travail demeure confidentielle. Mais (…) la technologie et les connaissances aérospatiales dont nous disposons aujourd’hui s’appuient sur ce qui a précédé, et (Mary Golda Ross) fait donc partie de la trajectoire plus large qui façonne l’aérospatiale d’aujourd’hui et de demain”, explique l’historienne Emily A. Margolis, conservatrice de l’histoire des femmes américaines au National Air and Space Museum et au Smithsonian Astrophysical Observatory.
Combat pour les Amérindiens
A sa retraite en 1973, elle s’engage auprès de l’American Indian Science and Engineering Society et de la Society of Women Engineers. Pendant trente ans, elle se battra pour que plus de jeunes Amérindiens et Amérindiennes s’intéressent aux sciences, aux technologies et à l’ingénierie. « Elle a non seulement fait toutes ces choses extraordinaires dans l’aérospatiale, mais dans le même temps elle a essayé de rendre l’ingénierie plus inclusive”, indique Emily A. Margolis.
En 2004, elle est en habit traditionnel Cherokee, invitée à l’inauguration du Smithsonian National Museum of the American Indian à Washington. Elle s’éteint en 2008 à la veille de son centenaire. Nul doute que Nicole Aunapu Mann aura une pensée pour son aînée lorsqu’elle arrivera à la station spatiale internationale.